Le soufisme en Islam: schisme ou hérésie ?

Nov 3, 2020 | Littérature arabe, Romans & Essais

Le soufisme dans la culture arabo- musulmane

التصوف ومكانته في الأدب العربي

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Brève définition du soufisme

A la mort du Prophète de l’Islam, les musulmans étaient divisés. Plusieurs sectes firent leur apparition et de celles-ci, deux grands groupes émergèrent. Le premier groupe, numériquement important, était caractérisé par son attachement à la tradition musulmane. La spécifité de ce groupe dans  l’Islam naissant  était l’attachement à l’appartenance arabe, la filiation tribale et les liens de parenté. Les membres de ce groupe qui constituait le noyau organisationnel de l’Islam « primitif », étaient adeptes du système du califat, même quand, sous Mu’âwiya fut installée la première dynastie musulmane, celles de Omeyyades. Ils se firent connaître sous le nom de « Sunnites » (ou adhérents à la tradition de Muhammed). Les membres de l’ autre groupe devinrent disciples de plusieurs descendants du Prophète, choisissant ainsi du fond de leur coeur et âme à maintenir des liens très solides avec certains membres de la Maison du Prophète (ahl al beyt). Ce groupe de Musulmans, à majorité non-Arabe, a été dénommé « Chiites ». Il y a au moins trois raisons essentielles dans la décision de ces non-Arabes à être Chiites.

Tout d’abord, beaucoup de Musulmans d’origine iranienne ou égyptienne se tournèrent naturellement vers le Chiisme en fonction de leur héritage culturel pré-Islamique. Par exemple, les Zorastriens Iraniens.  De même dans la croyance égyptienne, c’était considéré comme une hérésie que quelqu’un qui n’est pas de sang royal devienne chef, étant donné que selon la tradition, »le pouvoir de la Famille du Pharaon était d’ordre divin ». Compte tenu de cet héritage de croyances religieuses et politiques, il n’était pas surprenant que ces non-Arabes convertis à l’Islam suivent la ligne de Ali (le cousin et gendre du Prophète) et sa descendance. De plus,  l’opposition d’Ali au  Calife Muâwiya qui avait transformé l’empire naissant en dynastie (les Omeyyades), ont servi plus tard de fondement historique aux Chiite dans la résistance à l’hégémonie Arabe. Finalement, ces gens étaient très influencés par le témoignage de presque tous les Compagnons du Prophète selon lesquels Ali incarnait la vertu et la perfection humaines, et représentait un trésor inestimable de la connaissance Islamique. Sous l’angle de la sainteté, il était considéré comme le seul descendant spirituel du Prophète de l’Islam, et de ce fait préféré à tous les autres Compagnons du Prophète.

Dissensions, oppositions et conflits

Les deux premiers groupes mentionnés ci-dessus se sont divisés petit à petit, engendrant ainsi de violentes oppositions et des conflits. Leurs différends ont conduit finalement à l’empoisonnement de l’Imam Hasan (fils aîné d »Ali et second Imam Chiite), et au martyre tragique de l’Imam Hosayn (fils cadet d »Ali). En fin de compte, chaque groupe accusa et persécuta l’autre, le traitant d’infidèle et d’hérétique.

De fait, les divisions se manifestait à l’intérieur de l’ensemble chiite (le chiisme étant devenu un schisme de l’Islam), donnant lieu à des discordes et même à des affrontements armés; mais également dans l’ensemble sunnite (devenu majoritaire). Ces dissensions  (surtout chez les sunnites) perdurent jusque de nos jours, engendrant un mouvement particulier : le fondamentalisme musulman, islam radical qui n’hésite pas à recourir à la violence armée pour impose sa propre « lecture » de l’Islam.

Enfin, signalons que l’Islam sunnite se distingue notamment – et ce dès les premiers temps – par l’existence d’écoles exégétiques, chargées d’interpréter le Coran et au besoin d’en déduire des lois et des règles de conduite. Elles sont au nombre de quatre: les écoles Chafaite  ( ou Chaféite), Hanbalite, Malékite, Hanafite…

Ces écoles diffèrent souvent sur leurs interprétations et donc les conclusions juridiques qu’elles en tirent; ils leur arrive même de s’oppose radicalement, provoquant ainsi des animosités entre musulmans sunnites , parfois à l’intérieur d’un même pays. Signalons que le Maghreb a adopté majoritairement le rite malékite.


Bien que souvent l’on qualifiait de Chiites les Soufis qui avaient un penchant pour ‘Ali et sa famille, de Sunnites les Soufis qui avaient de l’admiration pour les Califes, en réalité les Soufis n’étaient ni Chiites, ni Sunnites mais plutôt de vrais Musulmans. Ce point de vue distinctif des soufis poussa les oulémas (docteurs de la loi islamique) sunnites et les mollahs chiites à qualifier les grands maîtres et saints soufis d’hérétiques et réclamer leurs condamnations à mort à travers diverses époques.

Evolution, transformation et diversification du soufisme

Au début du développement du Soufisme, les Soufis étaient d’abord concernés par les veilles nocturnes et l’ascétisme (Zohd). La pratique de la veille nocturne était l’une des vertus morales pour laquelle le prophète était très respecté, tandis que l’ascétisme s’est développé parce que les Soufis essayaient « d’abandonner le monde ». La pratique de l’ascétisme comportait fondamentalement le silence, la retraite spirituelle, le jeûne et l’ invocation continuelle d’un des Noms de Dieu ( ou Dhikr) . Initialement, la pratique du dhikr comprenait non seulement la répétition des divers noms de Dieu (au nombre de 99) et des phrases dont la plus commune était « la ilaha illa’llah » c’est-à-dire, « il n’y a pas d’autre dieu excepté Allah, le Dieu Unique (qui n’est autre que la profession de foi musulmane), mais aussi la prière rituelle (namaz), la récitation régulière des versets du Coran  et des supplications (du’â  دعاء).
L’importance de ces pratiques fondamentales du Soufisme est exprimée dans les vers persans suivants:

Le Souvenir continuel de Dieu,
Le silence, l’éveil, le jeûne et la retraite spirituelle,
voilà les cinq éléments dont la pratique permettent
à l’imparfait d’atteindre la Perfection.


A cette étape de l’évolution du Soufisme, on pourrait considérer Hasan al-Basri (692-728) comme le modèle idéal de Soufi.Dans son abstinence excessive et son ascétisme, il mettait la piété (taqwa) au-dessus de la prière (salat ) et du jeûne rituel de l’Islam (ruzah). Qoshayri rapporte qu’Hasan al-Basri a dit un jour, « Un grain de piété réelle est mieux que mille boisseaux de prières et de jeûne ».

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ُEn 2008, nous avions eu le plaisir de publier un livre de vulgarisation sur le soufisme, avec des histoires tirées des meilleurs ouvrages et illustrées par l’auteure, Zeinab ZAZA.

Cet ouvrages hélas épuisé, nous avons le plaisir de vous proposer quelques extraits.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Textes et illustrations : Zeinab ZAZA
Réalisation graphique : Rani Boudaakkar
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