Le système graphique arabe : les voyelles
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L’écriture arabe de la période pré-islamique à la transcription du Coran
L’écriture arabe avant la Révélation était – le moins que l’on puisse dire – rudimentaire, incomplète.
A l’origine,l’alphabet arabe est un dérivé de l’alphabet araméen , lui-même descendant de l’alphabet phénicien qui a entre autres, donné naissance à l’alphabet hébreu, grec et, partant, à l’alphabet en lettres latines. l’alphabet arabe désigne, en particulier, les lettres du système consonantique dit abjad qui sera, par la suite, complété par des points diacritiques qui permettent de distinguer les graphèmes trop ressemblants. Plus y tard, on y ajouta des voyelles brèves elles aussi diacritiques comme on le verra plus loin.
Possédant un fort impact dans le monde musulman, cette écriture a aussi été utilisée pour d’autres langues que l’arabe, sémitiques ou non, comme le berbère, le persan, certaines langues d’Asie mineure de religion musulmane… Lire à ce propos notre article: « l’écriture arabe à travers les langues ».
Il faut un véritable travail d’archéologie pour remonter aux sources de l’écriture arabe. Il peut s’agir du matériel conservé mais aussi des écrits des historiens musulmans de l’époque médiévale.
On peut voir dans le récit des historiens musulmans une construction rétrospective par des érudits pour décrire une écriture déjà fort élaborée, afin de mieux accréditer l’idée largement répandue durant des siècles (et jusqu’à nos jours dans certains milieu) que le Coran aurait été mis en écrit dès la Révélation et qu’il aurait circulé dès « l’aube de l’Islam » par lecture et non par transmission orale comme aujourd’hui cela a été prouvé. Par contre, les récits rapportant que les versets révélés et rapporté par le Prophète étaient transcrits vaille que vaille avec les « moyens du bord » de l’époque, tant en en matière de graphie que concernant les supports (peaux de bêtes, omoplates d’animaux, pierres plates etc…) semble plus plausible. Les premiers croyants utilisaient ces moyens rudimentaires comme un « pense-bête » en cas de défaillance de la mémoire lors des récitations.
L’ écriture préislamique
Avant même l’apparition de l’alphabet arabe, de nombreux graffitis ont été découverts dans la péninsule arabique jusqu’en Jordanie. Ces signes graphiques dérivent de l’écriture sud-arabique. . Les écritures arabiques étaient adaptées à la langue arabe, avec 27 à 29 consonnes. Cette graphie apparait vers le VIIIe siècle avant J.C., et présente une parenté avec le phénicien comme on l’a vu plus haut. Initialement cette écriture n’avait pas de sens fixe: on commençais la lecture de droite à gauche, puis on revenait, ligne suivante de la gauche vers la droite et ainsi de suite…
D’autres inscriptions, découvertes en Egypte, montrent l’usage de l’alphabet araméen (Ve siècle av. J.C.). Quelques siècle plus tard, les arabes développeront des dérivés de cet alphabet araméen, comme l’alphabet nabatéen ou l’alphabet syriaque.
Les origines de l’écriture arabe
Deux origines possible de l’alphabet arabe ont été proposées par les chercheurs: l’écriture nabatéenne, ou celle dite syriaque. Il y a certes une dose de syriaque,mais il est aujourd’hui quasiment établi que l’alphabet arabe descend de l’alphabet nabatéen. , en particulier de sa forme cursive. Cette évolution s’est déroulée sur plusieurs siècles.
Autre aspect important, d’ordre strictement religieux cette fois: l’alphabet arabe, plus d’un siècle et demi avant la Révélation, a été diffusé par le christianisme sans qu’on puisse établir si l’alphabet arabe a été créé pour la propagande chrétienne ou si la mission chrétienne s’est servie d’un instrument qui existait déjà.
Evolution de l’alphabet par l’ajout des diacritiques
La lecture du texte coranique sans points diacritique ni vocalisation ( s’agissant des voyelles brèves) implique une connaissance préalable du texte. Dans les plus anciens fragments du Coran (dont l’un des plus ancien a été découvert à Sana) , les lettres ayant pratiquement le même graphisme constituent plus de la moitié du texte, alors on a ajouté des points afin de les différencier. Le système consonantique donc sans voyelles brèves diacritiques) peut « donner lieu à des confusions dans la lecture de certains mots, C’est d’ailleurs toujours le cas aujourd’hui où ni romans , ni journaux ne sont vocalisés. La première apparition est une inscription de 677, sous les omeyyades. D’après certains chercheurs,, les premiers essais de normalisation de l’écriture par l’ajout de signes date du califat d’Abd-al-Mali. Bien que n’utilisant pas toutes les possibilités, les premiers exemples montrent un système complet. Au cours des siècles suivants s’observe une généralisation de ceux-ci dans tous les corans en circulations. Rappelons que l’imprimerie n’existant pas encore, les copies étaient le fait de copistes professionnels, connus pour leurs connaissance de la langue, du Coran, leurs talents en matière d’écriture…
Durant deux siècles, l’usage usage des diacritiques s’intensifie dans le Coran et les textes littéraires. Au cours de la période qui va jusqu’à la réforme d’Ibn Mujâhid (IVe / Xe siècle), la rédaction à proprement parler est achevée, mais le texte reçoit le complément de ces différents signes qui le précisent progressivement et le fixent de mieux en mieux. L’introduction systématique de la vocalisation et des signes orthoépiques (terme transcrit du grec pour désigner un mot qui conserve toujours son accent ou ton, quelle que soit sa position et son rôle dans la phrase), marque véritablement la fin de cette « rédaction », donc près de trois siècles après les fragments de Sana’a.
Le Problème des voyelles brèves
Fatha (a) | Damma (ou) | Kasra (i) | Soukoun
Absence de voyelle |
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Si la calligraphie peut faire l’objet de séances séparées un peu comme on ferait du dessin, l’apprentissage de la graphie, lui, ne peut pas être dissocié de celui de la langue. Le travail de discrimination auditive et le travail sur la correspondance son/signe, restent essentiels. S’y ajoutent quelques problèmes spécifiques. Celui des voyelles longues et brèves n’est pas des moindres : un double entraînement est nécessaire, phonétique pour faire distinguer les longues des brèves, et graphique puisque seules les voyelles longues font partie du corps du mot. Sinon, l’élève à tendance à mettre des voyelles longues partout, à la manière du Français (consonne-voyelle-consonne…). Là encore, il faut être vigilant, d’autant plus que le rapport brèves-longues touche à la morphologie. Un apprentissage rigoureux à ce niveau permet non seulement d’éviter de futures erreurs graves, mais aussi d’acquérir une prosodie correcte.
Pour les enseignants une fois le travail de découverte du code graphique effectué, il faut bien répondre à l’élève qui craint d’avoir affaire à des « fantômes », qu’il entend mais ne voit pas, qui sont présents dans le mot qu’on lui demande d’écrire : les voyelles brèves et autres phénomènes linguistiques représentés par des signes (soukoun, shadda, medda, tanwîn). Si le choix d’enseigner l’arabe sans noter systématiquement toutes les voyelles brèves est indiscutable, il est néanmoins indispensable que l’élève connaisse l’existence de ces signes et ce qui fait qu’un mot comme katab كتب peut se lire kataba, ou kutiba ou encore kutub. Une fois l’énigme des voyelles brèves élucidée, les élèves comprennent qu’on fasse un usage modéré et raisonné de ces signes.
ً | آ | ّ | ْ |
Tanwîn | Medda (toujours sur Alif) | Shadda | Soukoun |